Raoul
Nombre de messages : 179 Date d'inscription : 07/11/2005
| Sujet: ... Dim 20 Déc - 5:57 | |
| And the winner is :Bill Callahan - Sometimes I Wish We Were An Eagle
Le précédent de Bill Callahan, le premier sous son nom, était presque décevant, un peu mou-hésitant, un peu au milieu de la route tout en restant entre deux eaux, bref une tentative centriste frustrante. Celui-ci est un quasi miracle, une réussite totale et pour tout dire la meilleure chose entendue en cette année de crise indie-pop plus geignarde qu’inspirée. On dira un disque de rupture dans tous les sens du terme, loin des rivages lo-fi (il est fignolé) et pas loin d’un amour vraisemblablement perdu, un disque consistant (la vie est dedans), plein de tranquillité (cachée ?), une pierre de plus dans le jardin du désespoir tranquille, des arômes tertiaires et une belle maturité qui monte (regardez la monter c’est très beau.)
Si les mots me manquent pour décire tout çela (je suis faible) ceux de Bill Callahan sont bien là : « ...Well I used to be darker/Then I got lighter, then I got dark again/Somethin' to be seen, was passing over/And over me/Well it seemed like a routine case at first/With the death of the shadow, came the lightness of births/In the darkest of nights, the truth still dazzled/And I work myself, until I'm frazzled/I ended up in search of ordinary things... » « Jim Cain » premier titre, un hommage au noir, toute une palettes de gris : une caisse clair, une plus grosse, une guitare acoustique, des violons qui montent , cette voix qui descend, profond très profond ; le bathyscaphe et le baryton en somme. Le reste est à l’avenant « Too Many Birds », arbre aérien, l’ornithologue a du cœur, il n’y a plus de détresse devant l’oiseau, plus d’envols sombres… « My Friend » qui commence dans la douceur pour finir lugubre avec cette grosse caisse qui scande pour mieux clouer…« All Thoughts Are Prey To Some Beast » belle cavalcade, violons souples et inquiétude latente, « Faith/Void » splendeur terminale qui semble ne jamais vraiment vouloir en finir…
En fin de compte, ce disque est magnifique parce que Bill Callahan n’a jamais aussi bien chanté, parce que le mouvement circulaire de la vie passe dans et par les gouffres et précipices de sa voix parce que (osons le cliché) si le temps passe sur nos corps il passe aussi par nos oreilles et que ce temps là n’est pas du temps perdu. Pour notre plus grand plaisir ( ?) Callahan finira crooner, d’ailleurs ne l’est-il pas déjà un peu crooner ?Pour le reste : Jeremy Jay - Slow Dance
De Bobb Trimble aux garçons coiffeurs eighties, de Jonathan Richman aux machines cramoisies pour rien, de l’innocence des pionniers (Gene Holly, Buddy Vincent) au post modernisme sournois (Tom Devoto, Howard Verlaine), bref du noir et blanc de son premier album aux teintes roses délavées de celui-ci, Jeremy Jay aurait découvert la perversité post-pop. Oh rassurez-vous pas grand chose d’inquiétant dans cette perversité là ! un léger décalage, un beat neurasthénique : « Gallop », une guitare raide, une courte ligne de synthétiseur rachitique jouée avec un doigt, ce laconique dégoût nasillard dans la voix : « We Were There » de l’évidence mélodique un peu partout. en gros rien de compliqué.... Notre power-pop boy peigné circa 75 secoue quarante années de culture rock et les chansons tombent… vous me direz que la recette est simple et que c’est celle d’un adolescent indolent peu préoccupé par toutes ces histoires de transmission et de transcendance vers le style qui devraient occuper un vrai songwriter digne et mûre… et vous aurez raison car Jeremy Jay n’invente rien pas plus qu’il ne transcende. Vous me direz aussi que ce disque ne tient pas la route sur une pourtant ridicule distance de 32 minutes… et vous aurez encore raison. Vous me direz qu’il n’y a que trois vrais bons titres et que le reste sent le remplissage la rentabilisation pop et l’amortissement digital à pleins naseaux, vous me direz tout ça et vous aurait tort d’avoir raison… écoutez « Winter Wonder »… chose curieuse cette chanson, la meilleure chanson du premier album de Jeremy Jay, est plantée au beau milieu de son deuxième album, c’est pervers, compliqué, je tourne autour du pot et rien ne tombe… va t-il falloir que je secoue quelque chose ?
Minotaur Shock - Amateur Dramatics
Tiens, j’ai bien failli passer à côté de ce disque de Minotaur Shock alors que j’aime beaucoup Minotaur Shock ! Pour expliquer cet inexplicable oubli, il faut savoir que 4AD records, le soi-disant label indépendant de notre artiste concerné (Minotaur Shock, David Edwards dans le civil), avait cru bon et malin de le sortir, ce disque, comme on vote les lois scélérates à l’Assemblée nationale : en catimini, en août (de l’année dernière), et de surcroît uniquement sous forme compressé (en MP3 quoi). Bref si le soi-disant label indépendant de notre artiste concerné (David Edwards donc) avait voulu le noyer, lui et son nouvel opus, il ne si serait pas pris autrement... Heureusement pour nous notre ami Edwards est beaucoup plus futé que les boss vaporeux de chez 4AD et il a eu la bonne idée d’autorééditer son propre opus semi-noyé pas plus tard qu’il y a peu, et ce, sous la forme non compressée d’un vrai disque palpable et tangible. C'est donc cette autoréédition palpable et tangible que j'ai écoutée avec un plaisir non dissimulé. Pour tout dire et pour l'essentiel, c'est un disque guilleret, fringant, leste, ingambe (mais pas gambien), folâtre, primesautier, réjoui et même badin... Il y a toujours ces synthés bricolés, ces motifs répétitifs rachetés à un Philip Glass amoindri (dans le bon sens), cet esprit ludique et jongleur, qui court toujours et encore... Il y a aussi, chose nouvelle, de vrais instruments palpables, eux aussi : un violon, une clarinette, une flûte et un saxophone alto pas bégueule... Le mélange du palpable (analogique) et du non palpable (numérique) donnant à l'ensemble une allure plus organique et vivante que ma main droite ankylosée. On écoutera « Jason Forrest » et son saxo alto planté par un beat Detroit-Techno avec ce synthé grincheux qui la ramène dans le fond et cette guitare raide shoe-gaze qui surgit par la bande. On écoutera « Accelerated Footage » ses blips en tir rapide, son synthé-basse quasi implacable et son saxo quasi klezmer ... On écoutera surtout le « Zookeeper » qui ouvre l’album, une chose, un truc, un bidule... tendre, avec piano ironique, rythme bancal et millefeuille répétitif ; une merveille de bricoleur avisé. D'ailleurs, il est bien possible qu’il n’y ait rien de mieux que les bricoleurs avisés peut-être parfois le théâtre amateur,mais rien n’est moins sûr....
Yo La Tengo - Popular Songs
Je n'aurai pas grand-chose à dire sur le nouveau disque de Yo La Tango si ce n'est qu'il y a dedans des moments magnifiques et que c'est peut-être leur meilleur album avec leur Fakebook de 1990. Bref, vous devriez simplement l’écouter... Écouter « I'm on My Way » et « All Your Secrets » deux belles « chansons populaires » avec dedans tout ce qu’il faut de légèreté et de velours souterrain bien assimilé... « Periodically triple or double » et « If It's True » avec cette basse soulful qui tourne bien rond et cet orgue Hammond B-3 qui scande sous la petite lumière nécessaire... Vous devriez aussi écouter « By Two's » ce faible effort somnambulique juste cotonneux comme il faut avec une Georgia Hubley plus Moe tucker réussie que jamais... Ah oui ! j’oubliais un détail désobligeant : si les neuf premiers titres sont tous très bons, il y a par contre de quoi rester circonspect et dubitatif devant les trois derniers qui frôlent de façon métronomique le syndrome « intello velvetien » un peu vain ; trois interminables jérémiades (post my bloody tortoise) qui vous donneraient presque l’envie de lapider le premier hippie qui passe à portée de cailloux. S’il n’y avait pas ces trois notables scories le nouveau disque de Yo La Tango serait pour ainsi dire impeccable, écoutez-le, pour les neuf premiers titres, merci...
Sweet Trip - You Will Never Know Why
Le disque précédent de Sweet Trip était rempli de glittch electro qui craquaient dans l’oreille comme autant de pépins électroniques, il était aussi plein de brrr et de drrrr, des trucs bleepy qui sursautaient sur un tapis limite pop. Malgré tout ces bidouillages drum'n'bliss nous n’étions pourtant pas chez d’autres adeptes plus furieux et irrésolus de la chose, nous n’étions pas chez Venetian Snares... chez Sweet Trip il y avait des chansons, oui des amorces de chansons, un monde plus rose et pop, un monde plus fleuri, un monde alangui, du bonheur latent loin de l’embarras et de l'anthracite. Ce You Will Never Know Why (oui il est là, nouveau fuchsia et frais) est encore mieux et plus délicat, il est même pour tout dire charmant, il oublie les glittchs et autres « micro-accidents electro » pour naviguer vers quelque chose de plus fleuri : un genre de My Candy Valentine approximativement neo shoegaze avec jeunes filles éthérées et basses rondes de chez Sarah records.... Voilà il est ça, mais bien plus et tout à la fois aussi : pop, bossa, latin, post-punk dans l’esprit... Treize morceaux, treize délicatesse, mais pas de malheur, des rythmes complexes, parfois plus impairs que ma main droite, d’intéressants basculements harmoniques, des guitares acoustiques immaculées, une Fender plus préparée que le piano du même nom, des cordes luxuriantes, un Wurlitzer amniotique, des patterns de synthétiseur attrapent cœur... Voilà, voilà, tout ça, mais surtout par-dessus tout ça la voix de Valerie R. Cooper, une voix à la qualité nympholepte indéniable, une belle voix de jeune fille cristalline, on dira. Pour le reste quant à la nympholeptie vous pouvez me lapider ! Lapidez-moi c’est de saison, mais vous pouvez quand même écouter ce disque avant, merci.
A Place to Bury Strangers - Exploding Head
Et voilà que le neo-shoegaze lève sournoisement le bout du nez, et voilà que les primesautiers A Place to Bury Strangers appairassent toujours stiff et raides dans un second album qui ne décevra pas les amateurs du genre puisqu’ils y retrouveront tout ce qu’ils aiment : ces murs de distorsion à loyer modéré, ces rythmes abrasifs, ce chanteur maigrichon qui s’accroche au maelström (tout en regardant ses chaussures...) Pour la distorsion le fan neo-shoegaze de base sait déjà qu'Olivier Ackermann leader affiché de la clique sonique dont il est ici question est aussi l’inventeur d’une pédale multi-effets assez prisée du microcosme (Lightning Bolt, Wilco, U2, TV on the Radio l’utilisent également ...) donc il n’y a pas de mauvaises surprises à avoir, pour ce qui est des rythmes abrasifs il n’y par contre pas d'explication rationnelle (la carence en fer ?) quant à la maigreur vocale elle paraît rédhibitoire (c’est un problème). Pour le reste et pour tout le monde, les A Place to Bury Strangers sont toujours noir c’est noir, obnubilés par la mort et la destruction (Aleister Crowley est là, Charles Manson aussi, avec toute la famille...) et toujours plus My Little bloody Jesus Valentine qu’immaculés dans l’architecture globale de leurs morceaux : un bienheureux assemblage de bruit blanc monté sur des textures pop moribondes. Bref un peu à l’écart des quelques revivalistes vaporeux qui encombrent un peu trop le secteur : que du bon (bruit concassé) et rien que ça.
The XX - XX
La timidité butée des jeunes Young Marble Giants, la langueur ouatée de Mazzy Star, le lointain souvenir du Velvet, ce Velvet plus flottant et spectral que souterrain, celui des chansons... Des bribes R&B anémiées, le « dialogue » entre Gram Parsons et Emmylou Harris, des guitares claires et twang(s), quelque chose de primitif, d’heureusement primitif. Sur le papier, vous me direz que tout ça tient du curieux alliage, mais dans les oreilles c’est un assez beau mélange, qui fonctionne, vraiment...
Résumons, écoutons et voyons voir... S’il y a du vain à vouloir ressassé le passé, il est parfois nécessaire de s’appuyer sur ces quelques béquilles que le temps a crée pour nous, vous voyez bien ces jambes de substitution qui nous permettent d’avancer et de nous inventer tout neuf avec de l'ancien. Ici on évoquera les béquilles branlantes de la « culture rock » et leur nécessaire soutient, on oubliera par contre le ressassé d’autres, plus poseurs (le post-modern-punk faussement désespéré au goût du jour, la liste est longue). Si les XX évoquent bien tout ce que j’ai maladroitement évoqué plus haut (Young marble stars sur du velours conjugal) et décris plus bas (la tradition et la « culture rock »), ce n’est certainement jamais en voulant faire les malins ou en la ramenant, c’est presque toujours naturellement et, oserais-je dire, presque involontairement ? Nous y voilà, le disque de nos doubles X est un disque primitif qui se souvient (instinctivement ?) , qui s’invente avec les moyens du bord , dans la chambre, en faisant le moins de bruit possible, histoire de ne pas réveiller les voisins... Des chansons rock'n'roll en demi-teinte, un feedback, des beats minimaux sur des mélodies plaintives. Des histoires d’adolescents en vestes noires., des histoires d’amour d’adolescents disgracieux en vestes noires... Quelques-uns trouveront tout cela monochrome et fade, sans y voir la légèreté de touche, cette « guitare douloureuse avec un cœur agité », le goût du gardenal et l'engourdissent qu’il propose , cette heureuse inquiétude, ce tranquille désespoir à vivre que l’on éprouve la nuit en observant le plafond tout écoutant des chansons moroses.
Cold Cave – Love Comes Close
La frange la plus rétive d’entre vous trouvera qu’il faut être sacrement tordu pour apprécier cette chose contrefaite, ces synthétiseurs second lot et ce faux désespoir qui rôde… La frange la plus rétive d’entre vous aura bien raison puisque tordu en chef j’aime assez tout ça : ce patronyme nigaud, cette pochette improbable ce rétro post-punk toc et vain…. J’aime assez ces titres pâteux-patauds, ces morceaux péniblement arrachés au vide et cet esprit visqueux-rampant : Cebe and Me, sa laconique ligne de synthétiseur abrasive, Love Comes Close et Youth and Lust de l’early New Order sans l’absence et le chagrin latent, Life Magazine une tentative lo-fi-synth-pop sympathique avec une fille qui gazouille, The Laurels of Erotomania une tentative lo-fi-synth-pop sympathique avec un garçon qui barytone (du Pet Shop Boy au rabais ?) enfin j’aime tout ça un peu et j’aime surtout beaucoup, Heaven Was Full, une sacrée part de pudding ! Je l’ai écoutée onze fois de suite cette pâtisserie là et il y a de quoi étouffer plus d’un chrétien qui passe ; mon Dieu que c’est bon ! mon Dieu que c’est bête ! Ces tambours qui grondent, cette raideur joydivisionesque , ce faux Ian Curtis qui s’accroche, ces lyrics stupides, cette lividité pour RIEN, c’est tout ce qu’il faut aimer (parfois). Pour le reste je ne sais pas qui sont ces Cold Cave et je ne veux même pas le savoir.
NB : Ne soyons pas dupes il y a à prendre et à lâcher dans ce tombeau froid (le quasi tube idiot The Trees Grew Emotions and Died)
PS : J’ai écouté ça, en sautillant sur la tourbe Irlandaise, la tourbe cette terre élastique qui n’est pas une terre, mais plutôt une confiture d’arbres fossilisés, c’était ça le barde Van Morrison ou notre national Sardou et son Connemara ; je n’ai pas hésité. The Drums - The Drums EP
Les raisons qui nous pousse à aimer un disque, quand elles ne sont pas mystérieuses, sont parfois saugrenues. Tenez par exemple celui-ci : le premier de The Drums (Quel nom !), je l’aime beaucoup parce qu’il est frais et succinct là où d’autres sont longs, pléthoriques et rances (Saumâtre effet gaveur du numérique). Huit titres donc, pas un de plus, et surtout pas le temps de s’ennuyer. Pour rester, moi aussi, concis et plus bref que stoique je dirais que ce disque là, le disque des Drums c’est ce qu’il faut aimer, cette ferveur juvénile (en chemisette), ce curieux alliage froid-chaud, post-punk et guitares twang, le tout en équilibre sur une planche de surf… Une drôle de planche, un drôle d’effet boomerang qui sonne comme un incunable Factory 81 (The Wake) mais avec la twistante lumière des boys band de plage à tous les étages. On écoutera et réécoutera «Let's Go Surfing » : mains qui claquent, sifflements ingénus et mauvais bassiste à médiator ; un titre qui donne envie de gigoter en remuant une tête qui se vide plus qu’elle ne se remplie. D’ailleurs à ce titre ce disque je l’ai écouté la tête vide en sifflant et en gigotant et je l’ai beaucoup aimé, l’été est là : Let's Go Surfing !
Colin Blunstone - The Ghost Of You And Me Je ne voudrais par être le triste écho (voir le perroquet déplumé) de Francois Gorin (l’homme de goût des instits en détresse) mais ce disque est un cas d’école. Quatre titres passablement rock-FM qui rappellent le pire de Blunstone – Ses errances mid-seventies (deux albums à prendre avec des pincettes) ses panouilles chez les immondes Barclay James machin, une récente réformation des Zombies labellisée Franck Provost (les Zombies y étaient plus morts que vivants) – bref quatre titres plus botoxés et ignominieux que du Toto en pire ! Et puis soudain miracle ! Un quatuor à cordes, la voix de Blunstone et rien de plus… Si de la magie… Fermez simplement les yeux et écoutez monter cette voix, les yeux toujours hermétiquement clos, entendez la passer à hauteur d’azur, quelque chose de bleu qui paraît un cantique d’ailes, loin des corps, trop loin des corps ? Les mots me manquent pour décrire les six derniers titres…
Steve Earle – Townes
Tiens j’ai écouté ce disque sur la route entre Porto et Lisbonne, entre un pont Eiffel (attention il y a deux ponts métalliques à Porto) et une statue de Fernando Pessoa entourée de touristes culturels affectueux (attention il y a deux statues de Pessoa à Lisbonne.) Deux points cardinaux extrême-occidentaux, dans le sens de Dominique De Roux, on tire un trait : c’est la route. Circulation fluide, bon chemin, bon bitume et bonne musique. Même si l'abyssal cyclope Dick Curless eut été plus adéquate en rapport à la situation proposée (« Tombstone Every Mile » splendeur pour routier indolent) ce disque, hommage de Steve Earle à son ami Townes Van Zandt , faisait quand même très bien l’affaire.
Vous allez encore me dire que je m’égare, que je tente de noyer le poisson sur la route à hauteur de Coimbra (belle bibliothèque, jolies étudiantes...) et que comme d’habitude je ne vous parle pas vraiment de musique ! Faut-il vraiment que je vous parle de musique ?
Oui ou non ? Oui ! ?
C’est un disque bienveillant, le disque d’un bon camarade encore vivant, d’un outlaw texan assagi et plein d’amitié flottante … le disque d’un homme qui a su ne pas complètement sombrer (Alcool, héroïne, prison, une vie plus longue que la route entre Porto et Lisbonne) et surtout la preuve que cet homme là n’est définitivement pas devenu ce Bruce Spingsteen, de seconde main, que le destin nous prédisait.
Ho ! Earle n’est pas un chanteur extraordinaire ( pas plus abyssal Curless que sentimental Newbury…) mais il a l’immense qualité de rester humble et modeste devant toutes ces chansons de Van Zandt qui forcement tiennent d’elles-mêmes, alors s’il y a du respect (trop ?) et du savoir-faire chez lui il y a surtout de la maturité matoise, du calme loin du chaos et même une émotion quantifiable et tangible (« Marie », bon comme du Dylan old age). En somme le bel hommage apaisé d’un homme tranquille.
NB : On se souviendra de Townes Van Zandt parlant de son grand ami Blaze Foley : « He's only gone crazy once. Decided to stay » les deux sont morts depuis longtemps, Steve Earle, lui, est toujours vivant et il a bien raison.
PS : Sinon rayon outlaw le nouveau Willie Nelson : « Naked Willie » est une bien belle escroquerie (ou l’inverse.)
Seeland -Tomorrow Today
Les Everly Brothers et les Four Freshmen (et donc les Beach Boys) , la Space Age Pop de Raymond Scott et la manière retorse de Joe Meek, Left Banke et les Kinks, Cluster et Eno… la tentation Synth-Pop de Soft Cell et même l’excentricité relâchée de Monochrome Set… Plus près des temps qui nous occupent (nous accablent ?) l’évidence mélodique des Magnetic Fields voir pire en mieux le retro futurisme flottant des High Llamas …Bref voilà c’est un disque qui, petit miracle, ne s'enlise dans aucun marais post-moderne, sait d’où il vient et invente astucieusement en s’élevant avec le passé sous ses pieds ! Un disque où - au-delà de toutes ces choses évoquées plus haut - l’auditeur pourra écouter onduler des synthétiseurs rêveurs et apaisés, twanger des guitares qui font twang et résonner des chœurs pleins de bonté pop. L’auditeur affirmera que cet « aujourd'hui demain » est léger, non-amnésique et futé, qu’il est plein de promesses printanières et donc de saison, l’auditeur aura bien raison.
PS : Pour le casting Seeland est un genre d’espèce de mini super groupe : Tim Feltron échappé de chez Broadcast (Ah !Trish Keenan ) et Billy Bainbrirdge ex Plone (« For Beginner Piano » petite merveille labellisée Warp)
Circlesquare - Songs About Dancing And Drugs
Dois-je avouer ma primo-perplexité devant ce bidule post-moderne mollement posé entre Carl Craig et les Talking Heads ? Pourtant au final j’aime assez ça, il doit bien y avoir du bon dans cette semi-mollesse là, dans ce dub hannettien qui s’ignore, dans ce faux blues larvaire, madréporique et plus aboulique qu’un congrès de neurologues en goguette On ouïra sans peine « Hey You Guys » le premier titre, un bidule renfrogné plus maussade que l’ennui... mais en mieux, « Dancers » et son groove asthénique , comme noyé dans un élément glauque, et surtout «Ten to One » sorte de micro climax post partout (moderne, punk, opératoire..) et vrai délectation morose. Pour mieux en finir, frôler la précision, on ajoutera que l’auteur de la chose évoquée affiche un beau visage de lymphatique boréal, une bien belle mèche saupoudrée et une remarquable non-voix d’endive blême, ce qui ne gâche rien en rien… ou l’inverse.
Et encore :
Richard Hawley – Truelove’s Gutter (Dans ses recettes, mais très bon) Califone All my friends are funeral singers (hein tu la vois ma grosse maturité, hein ?) Robyn Hitchcock - Goodnight Oslo (Épatant, forcement épatant.) Silk Flowers - Silk Flowers (Sous joydivionesque en diable !) ProjectKOMAKINO - The Struggle For Utopia (Ian Curtis est tu là ? Boum, boum ! oui !) Liz Isenberg - Indifferent and Imaginary (le meilleur disque hippie dépréssif de l'année) Yoñlu - A Society In Which No Tear Is Shed Is Inconceivably Mediocre (Bientot culte, déjà culte ?) Fruit Bats - Ruminant Band (le meilleur ablum de Wilco pour cette année 2009) The Felice Brothers – Yonder Is The Clock (le meilleur ablum de Dylan pour cette année 2009) Milieu - Colortone (le meilleur album de Boards of Canada pour cette année 2009) Phosphorescent-To Willie (beau disque d'Outlaw dépréssif. As usual...) Blank Dogs - Under and under (Oui c'est bien) | |
|